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Ce qu’il faut retenir du rapport du Crif, qui pointe une « explosion » de l’antisémitisme en France depuis le début de la guerre à Gaza Le nombre d’actes antisémites recensés en France a été multiplié par quatre en 2023, selon le Conseil représentatif des institutions juives de France.

Écrit par le 25 janvier 2024


Une multiplication par quatre en un an. Le nombre d’actes antisémites recensés en France a bondi en 2023, à 1 676 contre 436 en 2022, selon un rapport du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), publié jeudi 25 janvier. Ce dernier déplore notamment une « explosion »  des actes antisémites après le 7 octobre, date des attaques du Hamas contre Israël.

Pour enrayer le phénomène, « il faut davantage de condamnation sociale de l’antisémitisme : aujourd’hui, (…) on peut tenir des propos antisémites sans que personne ne s’offusque, sans que personne ne prenne le soin de répondre », a déploré Yonathan Arfi, président du Crif, jeudi sur le plateau de France 2. « Le prix social à payer est trop faible et participe de la banalisation de l’antisémitisme. »

Le nombre d’actes antisémites recensés multiplié par quatre

De 436 en 2022, le nombre d’actes antisémites recensés a donc bondi en 2023 à 1 676, soit près de quatre fois plus. « Un acte antisémite, c’est un acte qui vise quelqu’un pour son appartenance réelle ou supposée à la confession juive », a rappelé Yonathan Arfi sur France 2. Ces actes concernent l’ensemble du territoire : ils ont été commis dans « 616 villes ou communes différentes, et dans 95 des 101 départements français », relève le Crif.

Jamais un tel niveau n’avait été atteint, a souligné Yonathan Arfi auprès de l’AFP, en rappelant qu’« on avait quelques dizaines d’actes par an dans les années 1990, quelques centaines sur la période 2000-2022 ».

Une « explosion » après le 7 octobre

Dans un pays qui abrite la plus grosse communauté juive d’Europe (environ 500 000 personnes), le Crif constate une « explosion » (+1 000%) des actes antisémites après le 7 octobre. Durant les trois mois qui ont suivi l’attaque du Hamas, leur nombre « a égalé celui des trois années précédentes cumulées ».

« Après le 7 octobre, on aurait pu avoir un effet d’empathie (…) : ça a été le contraire », soupire le président du Crif. Ainsi, d’une quarantaine chaque mois sur la période estivale, les actes antisémites sont passés à 563 en octobre, 504 en novembre et 175 en décembre.

« Le 7 octobre a servi de catalyseur à la haine, en activant un antisémitisme latent, et en désinhibant le passage à l’acte », commente Yonathan Arfi, selon qui la vision des civils israéliens massacrés a joué un rôle déclencheur dans ce phénomène. La baisse des actes antisémites en fin d’année reste « difficile à analyser » pour le président du Crif, qui reste prudent : « on reste très loin des chiffres d’avant le 7 » octobre.

Ce n’est pas la première fois qu’une vague antisémite survient après un évènement lié à l’actualité. En 2012 déjà, après l’attentat contre une école juive de Toulouse où trois enfants et un enseignant avaient été tués par le délinquant radicalisé Mohamed Merah, une hausse de 200% des actes antisémites avait été constatée. La progression avait été de 300% après l’attaque jihadiste contre le supermarché Hypercacher, en 2015.

Une majorité d’atteintes aux personnes

Dans six cas sur dix (57,8%), les actes recensés en 2023 ont été des atteintes aux personnes (violences physiques, propos et gestes menaçants…) plutôt qu’aux biens, selon le rapport. Un chiffre qui témoigne du fait que « c’est bien les juifs qui sont visés, en tant que personnes », juge Yonathan Arfi.

Dans plus de 40% des cas, il s’agissait de « propos et gestes menaçants ». Ces actes ont surtout été commis dans la sphère privée (31,9%) et sur la voie publique (20,4%), 7,5% d’entre eux ayant néanmoins été recensés sur internet. « Ce chiffre est à mettre en lien avec le sentiment, exprimé par certains Français de confession juive, d’être en insécurité dans leur propre maison, les conduisant parfois à devoir cacher tout signe de judéité », souligne le rapport.

Plus d’un acte sur dix survenu en milieu scolaire

Autre point inquiétant pour le Crif, 12,7% des actes ont eu lieu en milieu scolaire, dont une majorité au collège. « Un nombre important de ces faits sont accompagnés de propos faisant l’apologie du nazisme (près de 40% des actes) », ajoute le rapport.

« Il y a aujourd’hui une génération plus jeune qui est plus poreuse aux préjugés antisémites que les générations précédentes », note le président du Crif sur France 2. Il y a quelques années, l’opinion publique estimait « que le temps passant, la tolérance grandissait » et que « l’antisémitisme était un archaïsme historique qui allait être résolu », continue Yonathan ArfiAuprès de l’AFP, il identifie « trois carburants » à ce phénomène : « la haine d’Israël, l’islamisme et le complotisme ».

Un bilan qui reste incomplet

Le Crif précise que le rapport a été réalisé en compilant des chiffres « recensés par le ministère de l’Intérieur » issus des remontées des commissariats et des préfectures, et par « le Service de Protection de la communauté Juive (SPCJ) ».

Un signalement effectué uniquement au SPCJ, qui propose un formulaire à cet effet sur son site, « ne sera pas intégré au décompte du ministère s’il n’a pas donné lieu par ailleurs à un dépôt de plainte ou une main courante », expliquait à Libération en novembre, alors que les chiffres de l’antisémitisme dévoilés par le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, étaient critiqués. Ces chiffres ne reflètent donc « qu’une partie » des actes antisémites, ceux qui ont fait l’objet d’une plainte ou d’un signalement à la police, souligne le Crif.