Télévision : la durée d’écoute baisse de trois minutes, mais le streaming progresse

Les téléspectateurs regardent de moins en moins la télévision linéaire, mais les diffuseurs traditionnels trouvent une nouvelle jeunesse et une chance de revanche sur les champions du streaming dans la « plateformisation ». C’est l’un des enseignements principaux de l’étude de la division Glance de Médiamétrie, présentée à l’occasion du salon de l’audiovisuel MIPTV, à Cannes.

La durée d’écoute de la télévision linéaire dans le monde a encore baissé, perdant 4 minutes entre 2022 et 2023, à 2h21 par jour, selon cette étude sur 86 pays. Une érosion moindre qu’entre 2021 et 2022 (-11 minutes), après la crise sanitaire.

Si la tendance au recul est loin d’être nouvelle, l’étude montre en revanche que la durée passée sur des programmes audiovisuels, streaming compris, augmente légèrement. Aux Etats-Unis, où Médiamétrie dispose de données complètes, les Américains ont passé en moyenne 4h16 à regarder la télévision (câble, réseaux de télévision et streaming) en février 2024, contre 4h11 en juin 2021.

Plateformisation des chaînes

Le streaming payant et gratuit (Netflix, Disney+ mais aussi YouTube etc. ) s’y taille la part du lion, avec 43 % de la durée d’écoute, contre 31 % il y a trois ans environ, en prenant essentiellement ces parts de marchés aux chaînes du câble (phénomène du « cord cutting »). Mais cet essor, sur un marché mature comme les Etats-Unis, est avant tout le fruit des services de streaming gratuits.

« YouTube et les services de streaming financés par la publicité – ou AVOD, comme Tubi, Peacock, Roku… – tirent leur épingle du jeu. Dans un marché fragmenté, il y a une attirance pour le gratuit », souligne Frédéric Vaulpré, directeur de Glance.

Dans ce contexte, rien d’étonnant à ce que les chaînes de télévisions traditionnelles cherchent à prendre leur part du gâteau, en se lançant dans l’AVOD avec des contenus exclusifs, des programmes en avant-première, etc. En France, par exemple, TF1 a lancé TF1 + en janvier, suivi il y a quelques semaines par M6 avec M6 +, comme ITV fin 2022 au Royaume-Uni avec ITVX.

« Toutes les chaînes traditionnelles proposent des plateformes de streaming aujourd’hui, il y a une volonté de suivre les usages et d’attaquer le gâteau publicitaire dominé par YouTube et TikTok », constate Frédéric Vaulpré. Une méthode efficace pour rajeunir l’audience, qui est ainsi de 20 ans inférieure sur le service de streaming de la BBC, iPlayer, qu’en linéaire.

Fin du « binge watching »

Si les chaînes traditionnelles partent à l’assaut du streaming, à l’inverse, les spécialistes de la SVOD s’inspirent de plus en plus des recettes du petit écran, remarque l’étude de Glance. Ainsi, les plateformes investissent de plus en plus dans le sport – comme Netflix récemment avec le catch – et échelonnent davantage la programmation de leurs séries phares. C’est la fin du « binge watching », où l’on pouvait voir une nouvelle série en intégralité dès sa sortie, et qui avait fait le succès des géants du streaming.

L’étude relève aussi une baisse du nombre de productions par les plateformes (1.929 lancés dans 40 pays en 2023, contre 2.344 en 2022, soit une baisse de 18 %), confrontées à un impératif de rentabilité, et souligne en parallèle la force des programmes en direct, toujours capables de réunir des audiences massives. Autant de signes d’un rapport de force qui pourrait commencer à se rééquilibrer, dans le match entre diffuseurs traditionnels et plateformes du streaming.