« Madame Hofmann » : une vie pour le bien commun

« Bienvenue dans ma vie ! » Sylvie Hofmann, la soixantaine, ne se lasse pas de prononcer cette phrase cruellement ironique. Accablée par de sévères problèmes personnels – sa santé défaillante, les maladies de sa vieille mère et de son compagnon -, cette héroïne du quotidien subit également les rudes réalités du service de cancérologie d’un grand hôpital de Marseille où elle officie depuis des décennies en tant que cadre infirmière.

Habituée à accompagner des patients en fin de vie et à réconforter tant que faire se peut les familles de ces derniers, Sylvie doit également composer avec les restrictions budgétaires drastiques, le manque de personnel, les tiraillements entre les différents services de l’hôpital qui ne savent plus où accueillir les malades et « s’arrachent » les aides-soignantes encore disponibles.

Sylvie Hofmann, cette combattante, s’interroge : ne serait-il pas temps de penser enfin à elle-même et de prendre sa retraite ? Une interrogation immédiatement contredite par une autre : lui serait-il possible de vivre sans son investissement inébranlable pour les patients ?

Au coeur du tumulte

Dans son nouveau documentaire, Sébastien Lifshitz (auteur notamment de « Adolescentes » en 2019 et « Petite fille » en 2020) filme au plus près un « personnage » exceptionnel, à la fois dans l’exercice de ses fonctions professionnelles et dans ses (rares) moments de répit auprès de sa famille.

Les scènes les plus marquantes du film nous propulsent dans le tumulte hospitalier. En compagnie de son chef de service qui, sans y croire, tente de la dissuader de partir en retraite ou avec ses jeunes consoeurs qui oeuvrent pour soulager la douleur des malades, Madame Hofmann, ce petit soldat (presque) inépuisable, se démène, court en tous sens, pare au plus pressé et, souvent, recourt à l’humour pour ne pas sombrer dans le désespoir.

« Pour moi, l’hôpital est l’un des symboles de la République, explique Sébastien Lifshitz. Il incarne ce que la France a de mieux à offrir : une égalité de soin pour tous, une solidarité nationale. »

Sans didactisme, le cinéaste, en suivant pas à pas une femme qui a consacré sa vie aux autres, témoigne des souffrances et des blessures qui mettent à mal cette institution du bien commun. Avec « Madame Hofmann », Lifshitz ne signe pas seulement un documentaire émouvant, mais aussi et surtout un film d’intérêt public.