Au Canada, Gabriel Attal veut rassurer après l’affront du Sénat sur le Ceta

C’est son premier déplacement en tant que Premier ministre en dehors de l’Union européenne. Ce mercredi, Gabriel Attal entame une visite au Canada. Un déplacement de deux jours et demi, prévu de longue date et durant lequel il doit notamment rencontrer son homologue Justin Trudeau, dans un contexte particulier.

En France, d’aucuns au sein du gouvernement se sont demandés jusqu’au bout si le Premier ministre maintiendrait ce déplacement officiel que ses prédécesseurs avaient dû annuler, en raison du Covid, puis, pour Elisabeth Borne, à cause de la crise autour de la réforme des retraites. Car les dossiers brûlants ne manquent pas cette semaine, notamment avec la présentation du programme de stabilité et la zizanie autour des graves difficultés budgétaires du pays.

Mais il était difficile pour Gabriel Attal de manquer ce rendez-vous, alors qu’en France, le Sénat a envoyé un signal extrêmement négatif en se prononçant, sur fond de crise agricole, contre l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Canada (Ceta) . Pas question, pour le gouvernement français, de laisser s’installer le moindre malaise sur le sujet.

Accord défendu mordicus

Car si depuis sa signature, il avait mis peu d’ardeur à faire avancer le processus de ratification, conscient des réticences qu’il pouvait susciter jusque dans la majorité présidentielle lors du premier quinquennat d’Emmanuel Macron, l’exécutif défend mordicus un accord qu’il juge extrêmement profitable à la France, chiffres à l’appui, puisqu’il est entré en vigueur provisoirement en 2017.

Le Ceta s’est en effet traduit par une hausse des exportations françaises, en particulier pour les secteurs qui ont connu les baisses de droits de douane les plus significatives comme les cosmétiques. Il l’est aussi pour certaines filières agricoles et pour l’agroalimentaire.

Matignon insiste certes sur le fait que Gabriel Attal « ne se rend pas en urgence au Canada par rapport au Ceta » et souligne que « le vote [du Sénat, NDLR] ne change pas la relation bilatérale entre la France et le Canada », mais ce dossier sera forcément évoqué lors des discussions entre le Premier ministre et Justin Trudeau, qui tiendront une conférence de presse commune ce jeudi. Le chef du gouvernement aura sans aucun doute à coeur de rassurer.

Dossiers économiques prioritaires

D’autant que l’affaire en France n’est pas terminée et que le gouvernement, qui voudrait éviter de mettre en péril sa ratification, refuse de transmettre le texte du Sénat à l’Assemblée nationale avant les élections européennes du 9 juin prochain , attendant, si cela est possible plus tard, « un temps de débat apaisé ». Signe, toutefois, de l’importance de ce dossier dans ce déplacement, Gabriel Attal emmène dans sa délégation des représentants de filières « directement bénéficiaires du Ceta et mobilisés pour le défendre », précise l’entourage du Premier ministre.

Il sera aussi question avec Justin Trudeau de francophonie – il est espéré en octobre prochain à Villers-Cotterêts pour le 19e sommet de la Francophonie. Gabriel Attal compte également aborder les dossiers économiques prioritaires pour la France des matériaux critiques ou encore des transports et de l’énergie. Bref, il s’agit de rappeler l’importance aux yeux de la France de sa relation avec ce partenaire et allié, qui plus est l’année du 80e anniversaire du débarquement – Justin Trudeau sera d’ailleurs présent aux cérémonies en France.

Stature internationale encore naissante

Après Ottawa, Gabriel Attal se rendra au Québec, province avec laquelle la France entretient une relation « directe et privilégiée », souligne Matignon en reprenant les mots du général de Gaulle. Là, le Premier ministre s’exprimera notamment devant l’Assemblée nationale du Québec.

Le dernier chef du gouvernement à y avoir pris la parole était… Laurent Fabius en 1984, fait valoir Matignon. Ce déplacement sera aussi de ce point de vue l’occasion pour Gabriel Attal de travailler sa stature internationale encore naissante.