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Temps de chiens à Caracas

Écrit par le 10 avril 2024


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Dans un Venezuela post-chavezien chaotique et exsangue, les chiens errants sont légion. Ils ont été abandonnés par leurs maîtres qui fuient la faim, la corruption et la répression. Tel est le point de départ pré-apocalyptique du second roman de Rodrigo Blanco Calderon.

Le sombre portrait que le jeune auteur brosse de son pays dans « De l’amour des chiens » est un portrait en creux. Sous l’apparence d’une fable, il multiplie les fausses pistes, les références littéraires et cinématographiques, flirte avec le réalisme magique, pour mieux explorer tous les possibles d’une condition humaine dévastée.

Son héros porte le nom mythique d’Ulises. Critique de cinéma tout juste séparé de sa femme Paulina, il entretient néanmoins une solide amitié avec son beau-père, un général à la retraite. L’homme, victime d’une maladie pulmonaire, décède en lui léguant un cadeau empoisonné : s’il transforme la grande maison familiale en refuge pour chiens médicalisé dans les six mois, il héritera de l’appartement qu’il partageait avec Paulina. Mais cette dernière et son jumeau Paul n’ont aucune envie de se voir déposséder de leur héritage. La lutte s’annonce serrée. Lutte contre le duo diabolique et leur avocat, lutte contre le temps et contre le passé brûlant qui jaillit brutalement telles les pièces d’un puzzle projetées sur le sol.

Palace hanté

L’amour – ou son ersatz – s’invite en la personne de Janine, une mystérieuse ex-amante qui refait surface peu à peu après la rupture avec Paulina. L’histoire, la grande, est aussi de la partie : elle est symbolisée par l’Hôtel Humboldt, planté au sommet du Mont Avila qui surplombe le futur centre canin. Ce palace désaffecté, créé par l’ex-dictateur Jiménez dans les années 1950 est gardé par un énigmatique centenaire et se visite la nuit comme une maison hantée. Autres fantômes imposants, celui du « Libertador » Simon Bolivar et de son chien fidèle, ancêtre de tous les damnés à quatre pattes de la terre.

Entre digressions et divagations, rencontres (extra)ordinaires avec des personnages équivoques, Ulises poursuit son odyssée somnambule dans un Caracas à cran. Les secrets de famille se révèlent en cascade, « De l’amour des chiens » prend des airs de thriller avec en ligne de mire l’inauguration du centre canin « Simpatica », promesse d’une dérisoire oasis dans le désert humain vénézuélien.

Le lecteur est ballotté par les vents contraires de cette tragi-comédie, où les victoires, les défaites et les passions s’écrivent sur du sable. Dans les ruines virtuelles de Caracas, seuls les chiens semblent encore croire en l’homme, suggère Roberto Blanco Calderon, dans un geste littéraire aussi ironique que désespéré.

De l’amour des chiens

Roman vénézuélien

de Rodrigo Blanco Calderon

Traduit par Robert Amutio

Gallimard, 265 p., 23 euros

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